L'adoption des règles pour protéger la population civile contre les
effets de la guerre représente un acquis considérable dans le droit
humanitaire. Le C.I. C.R avait déjà proposé des textes à ce sujet,
notamment en 1957, mais il s'était alors heurté à un refus courtois de
la part des États. Sa satisfaction est donc complète sur ce point, ses
propositions ayant largement été suivie lors de la conférence
diplomatique.
Un titre entier du
Protocole I est consacré à ce domaine. Ces règles devraient désormais
éviter à la population civile de grandes souffrances et des drames,
comme ceux qui se sont déroulés pendant la deuxième guerre mondiale.
Pour protéger les civils contre le feu des armes, il n'existait,
jusqu'en 1977, que des textes incomplets : la convention de la Haye,
régissant la conduite des hostilités, date de 1907 - époque où
l'aviation n'existait pas et où l'artillerie n'atteignait des objectifs
que sur des distances relativement courtes ; pour sa part la IV°
Convention de Genève de 1949, à l'exception de quelques règles
générales, ne protège les civils que contre les abus de pouvoir de
l'autorité ennemie ou occupante. Elle ne comprend aucune disposition
relative à l'emploi des armes, à leurs effets et, notamment, aux
bombardements massifs.
Par ailleurs, les
trente dernières années ont vu surgir des conflits de types nouveaux -
guerres de libération, tactique de la guérilla, utilisation d'armes
perfectionnées et in discriminées comme des armes incendiaires, les
projectiles à fragmentation par exemple. La population civile, souvent
mêlée malgré elle aux combattants, est donc rendue plus vulnérable.
C'est pourquoi il est important de prévoir des normes juridiques de
protection dans ce domaine.
Le Titre IV du
Protocole I protège à la fois les personnes et les biens civils,
lesquels sont définis par opposition aux objectifs militaires. Il est
expressément indiqué qu'il est interdit d'attaquer la population civile
en tant que telle - de même que les biens civils - et que seuls les
objectifs militaires peuvent être l'objet d'attaques. Les bombardements
massifs - tels ceux qui, pendant la deuxième guerre mondiale, ont causé
des millions de morts - sont désormais prohibés, ainsi que les attaques
lancées à titre de représailles. Les attaques sans discrimination,
c'est-à-dire celles risquant de frapper indistinctement des objectifs
militaires et des personnes civiles ou des biens à caractère civil, sont
interdites. De même, il est interdit d'attaquer des localités ou des
zones démilitarisées. Enfin, des mesures de précautions doivent être
prises par les forces armées, afin d'épargner au maximum la population
et les biens civils pendant les opérations militaires.
Quatre articles sont consacrés aux secours en faveur de la population
civile - domaine intéressant la Croix-Rouge au premier degré. Selon ces
dispositions, les parties au conflit doivent fournir les secours
nécessaires à la population civile, ou, si elles ne sont pas en mesure
de procéder elles-mêmes à son approvisionnement, doivent accorder le
libre passage des denrées indispensables à sa survie. Cette règle
s'applique en toutes circonstances, même s'il s'agit d'une population
ennemie ou vivant en territoire occupé. Les modalités d'action
comprennent des facilités pour les organismes de secours, ainsi que la
protection du personnel spécialisé.
Ces
articles complètent les dispositions du Protocole relatives aux biens
civils, qui interdisent d'utiliser la famine comme méthode de guerre. En
outre, les biens indispensables à la survie (zones agricoles, bétail,
réserves d'eau potable, récoltes, ouvrage d'irrigation, etc.) sont
désormais protégés, de même que les installations de forces dangereuses
(centrales électriques et nucléaires, digues, barrages, etc.), les biens
culturels et les lieux de culte. Enfin, les opérations militaires
doivent être conduites de manière à protéger l'environnement naturel
contre des dommages durables, étendus et grave.
Pour assurer une protection efficace des installations contenant des
forces dangereuses, un signe de protection international a été adopté
par la Conférence : il s'agit de trois cercles de couleur orange vif.
Un chapitre spécial a trait aux organismes de protection civile qui
sont désormais protégés et on droit à des facilités d'action - y compris
dans des territoires occupés. La nécessité d'identifier ces organismes a
été soulignée et un signe spécifique - triangle bleu sur fond orange -
leur a été accordé.